jeudi 5 avril 2007

Le candidat à la présidentielle, ce produit manufacturé.


Une campagne présidentielle est probablement l’ère la moins intéressante de la vie politique.

Chaque mot des aspirants au pouvoir ne peut être entendu et traduit sans prendre en considération sa dimension électoraliste. Par ailleurs, chaque action des groupes d’électeurs aux intérêts singuliers, agglomère toutes sortes de gémissements et revendications qui ne peuvent être comprises autrement que par une opération opportuniste.


Un souffle, une attitude, un mot, une main posée sur une épaule.

Non.

Un journaliste… ça ne convient pas non plus.

Un essaim de journalistes, un souffle, une attitude, un mot, une main posée sur une épaule, une représentation qui se façonne, le discours de fond s’évapore. C’est un personnage de cire qui se crayonne sur le parcours des écrans et des micros.


Ne parlons plus d’idées ni de concepts, les gens ne les déchiffrent pas, doivent-ils se dire. Ou bien pensent-ils que ceux qui comprennent ont précocement fait leur choix, lorsque les plus légers votent à l’affect, comme on estimerait et choisirait une marque de café plutôt qu’une autre. Ainsi décide-t-on d'engager une campagne de branding.

Simplification extrême par un procédé qui humilie irrémédiablement candidats et citoyens. Mais ces derniers ne comprennent pas, pensent les premiers.


Il faut plaire.

Les suffrages sont conditionnés par un impératif d’ensorcellement, conception née de l’ambition et de la volonté d'atteindre le pouvoir quelque soit le procédé adopté, tant qu’il est pioché dans le marais de possibilités d’une société démocratique.

L’objectif et bien de séduire, d’attirer.

Se faire élire, puis rester.

Il n’est nullement question d’autre chose. Alors on me réfutera que l’on peut charmer par ses idées. Bien entendu. On peut méditer les grands courants, les idées de base, les préférences culturelles, l’assise historique, ... Il s’agira toujours, au-delà de toutes ces strates sédimentaires, de se faire élire, et d’envoûter.


Mesdames, messieurs, dispersez vous et faites place au marketing. Cette discipline qui tend à déterminer la nature d’une offre de bien ou de service en fonction des attitudes des consommateurs. Cette pratique, profusément répandue à présent dans le champ politique, Lewitt la définissait ainsi "Le marketing est une conception de la politique commerciale qui part du principe que la fonction fondamentale des entreprises consiste à créer une clientèle et à la conserver, et qui permet aux entreprises d'exploiter au maximum toutes les ressources dont elles disposent".

Pitoyable application que celle à l’œuvre lors de cette campagne présidentielle (ainsi que pour tant d’autres). Cette dernière mériterait d’enfanter de débats à une hauteur au moins analogue aux enjeux de notre société. Pourtant…

Sans aborder le large et passionnant volet publicité de l’éventail marketing, l’avenir relatif d’un pays se joue donc sur des méthodes de persuasion ou de rhétorique imaginées par quelques Spin doctors (faiseur de présidents), sur les aspects émotionnels au détriment d’un débat (mot si usurpé qu’il en semble grossier) portant sur les programmes précis et les points techniques. Je ne parle de rien d’autre que de manipulation, d’adaptation d’un message aux attentes supposées de l’électorat, de cosmétisation de l’apparence.

Le président d’une nation, où qu’il soit dans le monde, ne l’est devenu qu’en étant séduisant et populaire. Des engagements démagogiques aux promesses les plus populistes, en passant par les mystifications les plus prodigieusement simplistes, le répugnant spectacle de la campagne électorale qui nous est offert depuis de trop longs mois anticipe fort bien du quinquennat à venir, et ce quelque soit l’élu.

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